Dimanche 5 décembre 2010 à 19:44

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On ferait bien de ne pas prendre l’option géographie pendant les 2 premières années de khâgne. C’est une discipline qu’il fait bon expérimenter en khûbe, quand on a le temps de s’amuser.
La géo, c’est d’abord une expérience de l’absurde. On n’a pas de méthode pour les DS alors on essaye de réadapter les bonnes vieilles recettes. Mais on n’est pas aidé : 3 épreuves, 3 formats différents, aucun de ceux qu’on passe au concours.
La géo, c’est aussi l’art de disserter sur un sujet dont on ne sait rien, en reliant benoitement quelques connaissances tirées d’autres matières à une improvisation créative.
La géo, il faut savoir que c’est une matière qui suscite la haine des éditeurs : presque aucun livre récent sur les territoires étudiés. Mais sinon, où est l’aventure ?
Car le grand mérite de la géographie, c’est que c’est une sorte de cours de récréation intellectuelle : puisque de toute façon l’épreuve est impossible, on s’amuse beaucoup à parler de ce qu’on ignore, à imaginer ce qu’on est censé répondre sur une question dont on ignore tout, jusqu’aux problématiques, c’est inventer une question dont on ne sait pas la réponse.
Non vraiment, la géographie, c’est marrant.

Dimanche 6 juin 2010 à 21:22

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Image vue sur l'excellent blog "Journal d'une hypokhâgneuse"
Dans le genre il y a aussi celui de Soubi qui est très bien

 

Il y a cependant une période qui surpasse toutes les autres niveau angoisse : la période de révision des oraux.
Le préparationnaire est soudain confronté à un désert après l’effervescence.
Un désert temporel : finies les journées de huit heures de cours (plus une khôlle), où il fallait se dépêcher de rentrer pour finir une dissertation ou deux et entamer la référence d’un illustre universitaire. Le nouveau mot d’ordre est grasse matinée (la plupart des professeurs renoncent à donner cours avant 10 heures de peur de voir les effectifs passer dans les négatifs), il y a même un week-end de trois jours (ce qui tient du sacrilège). Le préparationnaire ne peut que se sentir autorisé à prendre des pauses plus longues que d’ordinaire devant cet emploi du temps 0% de matière grasse et rappeler de vieilles connaissances pas vues depuis deux ans.
Mais il se confronte alors à un deuxième type de désert : le désert social. D’une part, la fréquentation des heures de cours présente un écart-type bien plus resserrés que pendant l’année scolaire pré-écrits : 2/3 de la classe aux cours les plus fréquentés (le tiers restant se vengeant probablement de l’obligation de se présenter en cours le reste de l’année, ou plus charitablement passent des khôlles), on atteint le minimum de 1/5 de la classe en cours de math ou de langue. Les internes profitent de cette impunité pour mettre en place un roulement des présences. Certains restent en arrière pour surveiller Rolland-Garros (on sait jamais, dès fois qu’il s’échappe). Mais c’est pas grave, puisque même ceux qui viennent en cours surveillent l’évolution du score depuis lors leur PC portable (on est jamais trop prudent).
Mais le désert est surtout extérieur à la prépa : personne d’autre n’a la décence d’être en vacances à cette époque de l’année. Le préparationnaire désœuvré va parfois jusqu’à hanter les murs de la prépa, pour se donner une contenance.
Car un ultime vide guette : le vide intérieur. La révision des oraux est passée sous le signe de l’indétermination. Il doit se préparer à des examens mais il n’a aucune certitude concernant sa réussite des écrits. Il travaille donc en sous-régime, sans trop y croire. Et c’est ça qui est terrible : le vide des journées. Habitué à être saturé, cette absence d’obligation véritable le paralyse, le terrifie. Il ne veut pas croire qu’il peut se lever à 9 heures tous les jours, ne travaille que huit heures par jour.

Il se sent alors obligé de saturer ses journées par ses propres moyens. Heureusement, les Dieux sensibles à leur nervosité mettent à leur disposition de moult horaires de khôlles.
Lorsque les rendez-vous se conviennent de prof à élève, l’affrontement est modéré : l’horaire prévu n’est annulé que sur un commun accord, une autre plage horaire pourra être convenue à la fin de l’entretien dans le calme et la sérénité. Certains cours (en partie ou totalement) dédiés à la planification.
Le niveau 2 de la rixe survient lorsque les listes sont affichées dans la classe : on s’inscrit, on se raye, on négocie, on essaye d’éviter tel khôlleur trop sévère, on regrette de ne pas s’être précipité à temps pour avoir les meilleurs créneaux.
La fourberie et la violence sont à leur comble en ce qui concerne les listes affichées dans le couloir ouvertes à tous les élèves (comme les khôlles de langue). C’est le pugilat pour réussir à inscrire son nom dans un espace vierge, mais rien n’est acquis. Il faut se battre pour sa place, certains n’hésitant pas à rayer inopinément les autres pour inscrire le leur à la place, sans consulter l’intéressé, naturellement. La période des oraux révèle la nature humaine : lâchez les chiens.

La sournoiserie n’est pas réservée aux élèves : certains professeurs usent de cette période pour déchainer leurs instincts sadiques. Le cours se métamorphose en oral devant la classe. Dans cette situation, les meilleurs regrettent d’avoir fait montre de leurs talents au grand jour, puisqu’ils sont alors désignés pour passer au tableau. Parfois, ils poussent la duplicité en prenant les élèves au piège : improvisant un cours à un horaire où on ne les attendait pas, ils prennent en otage les malheureux qui travaillent en classe, ils ferment la porte avant qu’ils n’aient le temps de rassembler leurs affaires. Alors, ils les obligent à préparer un oral surprise, avant de désigner un volontaire qui passera devant les autres. On n’y prendra pas le préparationnaire à deux fois.

Vivement les admissibilités, qui donneront un sens à cet exil.

Vendredi 28 mai 2010 à 10:25

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Certains Dieux ne sont tout bonnement pas affectés par les contingences bassement matérielles. Notamment le Dieu des mathématiques.
Esclave de ses bijoux high-tech (netbook qui sert à collecter les adresses des disciples –électroniques, évidemment- ; téléphone portable qui sonne sans arrêt –sa déesse de femme apparemment, appelons-la Hera au regard de la fréquence de ses appels), il refuse de se faire avoir jusqu’au bout : il ne porte pas de montre, de peur de se transformer en lapin du pays des Merveilles.
Expert dans l’art de diagonaliser de tête des matrices, tout se complique lorsqu’il est question de calculer des heures et des minutes. Etrangement, sa calculette mentale retarde en permanence, c’est un principe : jamais moins de 10 minutes après la sonnerie. Lorsqu’il ne devise pas avec les préfets ou prétexte une photocopie à faire – dont les élèves ne verront jamais la couleur, photocopie étant un mot codé pour désigner « sortir fumer une cigarette » ; il a tout simplement oublié de partir de chez lui. Il n’hésite pas à annuler les cours d’une classe pour finir celui qu’il a commencé avec la précédant (oui, sans surprise il était en retard. En retard d’une heure).
Plus généralement, l’homme n’a aucune notion de l’échéance. Il promet les copies corrigées pour le cours suivant (et demain on rase gratis). À la fin de l’année, un bon tiers des paquets de copies s’est mystérieusement vaporisé, les disciples ont planché 4 heures pour rien (enfin, pas pour rien. Ça leur fait de l’entrainement. D’autant plus fructueux que la correction ne sera jamais prodiguée, les disciples étant vraisemblablement censés la deviner dans la tête du maitre.
Finalement, on peut se demander si le Dieu des math ne diffère pas à ce point des mortels au point de ne pas être doté des formes a-priori de la sensibilité : on a déjà vu que la notion de temps lui est étrangère, mais au regard de (l’absence totale de) la structure de son cours, il ne semble pas non plus avoir celle de l’espace. Le khâgneux, ayatollah du 3x3x3 partie, est médusé devant un cours où on peine à distinguer les chapitres.
Mais qu’importe, après tout, c’est un artiste.

Mardi 4 mai 2010 à 23:34

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En hiver le préparationnaire est confronté à un dilemme cornélien : ouvrir les fenêtres afin de renouveler l’air saturé de réflexions intenses et manquer de finir congeler ou mourir d’asphyxie. Evidemment, sur trois khâgneux, il y a cinq avis différents (oui, parce qu’il y a les schizos). Heureusement, une légion se retire du débat et s’en va affronter le froid polaire pour une bouffée de nicotine. D’autres se terrent contre les radiateurs, judicieusement placés sous les fenêtres : rafraichir les circuits cérébraux, réchauffer le ventre pour faciliter la digestion (des connaissances). Ceux qui restent à leur place pour s’épargner tout mouvement inutile rapprochent les pans de leurs pulls et jettent des regards meurtriers en direction des croisées mais bizarrement l’air ne s’en trouve pas réchauffé.
Le pire reste à venir : devoir entrer dans une salle de taupins après une heure de math sans avoir le temps d’assainir l’air. Les exhalaisons de pivot de Gauss manquent de provoquer des crises d’apoplexie parmi les rangs des pauvres hiboux plus familiers des arômes de littérature.
Quelques semaines plus tard, lorsque la moitié de le classe éternue pour cause de manque de sommeil et d’atmosphère frigorifique, un Dieu de math profère la remarque létale : « c’est parce que vous n’ouvrez jamais les fenêtres, vous masserez dans vos germes. » Mais le khâgneux pratique l’austérité et l’exotisme : quitte à tomber malade, il préfère que ce soit avec le bon air frais et pollué de Paris.

Samedi 17 avril 2010 à 11:52

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Exil. Hors du monde. Repos. Les vestiges et l’amour et les tambours peuvent bien attendre. Une vie réglée, une vie qui se confond avec le tic-tac. I’ve trapped myself in a ring of fire. Je n’ai plus à penser, je n’ai plus à être moi-même. You’re not for this world, this one is for you. Quel jour est-on, comment vont les autres : ça ne m’atteint pas. Ici rien ne ressemble à la ouate quotidienne. Ici, j’ai pris conscience que j’étais invincible.
Exil. Triangle. Un maillage étroit de non-dits et de désirs avortés, de fausse complicité sur fond d’urgence et de panique, ce n’est pas le monde, c’est ailleurs. Her eyes go cold as she begs the world to just let her go. Un huis clos éphémère, rien n’a de sens car nous ne nous reverrons jamais.
Exil. Ne plus prendre la peine d’être lisse, douce, adorable. Une infection. I've lost friends, lost lovers, but I've still got my soul. Ils sont restés sur la bande d’arrêt d’urgence, il n’y a plus de place pour eux dans ma tête, dans mon cœur, dans mon emploi du temps. Il n’y a pas de place pour eux ici. La vie est réduite à un planning, pas d’intervalle pour penser, pas d’intervalle pour aimer, Andréas, seuls des désirs tailladés affleurent parfois, les pulsions se confondent avec le sommeil, pas d’intervalle pour eux, pas d’intervalle pour moi. Donnez-moi quelqu’un en pâture, n’importe qui, pourvu que je me sente moins seule. Pandora.
Exil. Welcome to Oblivion. Tout va tellement vite, les jours dégringolent, rythmés par le bourrage de crâne et les parenthèses de décadences, est-ce qu’on rit pour fuir les études ou est-ce qu’on étudie pour fuir les ricanements désarticulés. Devil is in the details. Même l’échéance n’a plus de sens, il faut courir après les mots, les imprimer en soi, s’engorger pour mieux disparaître, il faut séduire pour se remplir de désir, il faut jouer pour se remplir de règles, il faut ne pas perdre de temps, il faut se concentrer, il faut dormir, il faut retenir, il faut sage, brusquer, travailler, perdre, exiler. That the movie on your eyelids is no reflection of myself. No reflection of myself.

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