Lundi 19 janvier 2009 à 22:22

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Il me scrutait tandis que je montrais les crocs.
« Quel est ton nom ? »
Je ne savais plus. Que signifie un nom lorsqu’on est seule ?
« Ils m’appellent Phobos. Veux-tu être Callisto ? Ce nom en vaut bien un autre. Viens avec moi. Tu n’es plus seule. »
Il tendait la main, je ne savais comment réagir, je ne savais plus parler.
Il a trouvé les mots pour parler à mon humanité endormie, il m’a convaincue. Il a prit un temps infini pour que je retrouve ce que j’avais perdu.
Voilà mon histoire.

Il n’est pas comme moi, il a été transformé par un Wampyr puis abandonné. Il ne lui en tient pas rigueur. C’est quelqu’un de bon. Il est plus humain que bien des mortels.
Nous sommes comme vous, nous avons besoin de quelqu’un pour affronter l’éternité. Et il m’a trouvée.
Nous ne sommes pas comme vous.
Je passe des décennies sans voir son visage. Il ne me manque pas.
Je sais quand il a besoin d’être seul, il sait quand me retrouver.
Le monde est trop petit pour nous deux.
Vous ne comprenez pas ? Je m’y attendais.

Je ne vous conterai pas une aventure avec un mortel, une relation condamnée d’avance, Tristan et Iseult condamnés à la mort… C’est d’un commun.
Certaines choses ne peuvent être dites. Les Wampyrs ne sont pas très adroits avec la tristesse.

Je vous aime, mortels. Je vous méprise pour cette raison, j’aime cette fragilité en vous. Je vous envie car vous êtes condamnés à affronter la mort. Moi, j’avais trop peur. J’ai trop peur pour l’éternité. Je refuse de m’éteindre. Je refuse de disparaître.


Il y avait en ce temps là de plus en plus de Wampyrs de par le monde, dissimulés aux quatre coins du monde. Ils devenaient de plus en plus civilisés, à force de se nourrir de vous, en créant de nouveaux compagnons, par émulation mutuelle. Il s’est formé de petites communautés (elles restent très restreintes pour éviter de dissimuler une ville en une nuit, cela manque de discrétion). Nomades, nous visitions nos frères, nous ne nous attardions pas : nous n’avions besoin de personne.

La question des origines me taraudait. Pour Phobos, cela allait presque de soi : il descendait de celui qui l’avait créé.
Les siècles passaient. Phobos et moi nous éloignions des mois durant.
Je me mêlais aux humains, parfois, mais comment s’attacher : si fragiles…
Je me refusais à me façonner un compagnon. Il y avait Phobos, bien sûr et puis… Je ne voulais imposer ça à personne. Plus encore, j’avais peur d’être confrontée à un échec. Depuis que j’étais un Wampyr, tout semblait aller de soi, la première stupeur passée. Ma rencontre avec Phobos même était inéluctable. J’avais été une humaine insignifiante, j’étais un Wampyr passable. Je ne pouvais risquer d’être un Wampyr raté.

Dimanche 18 janvier 2009 à 21:54

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C’est dans ces moments-là que je sais que je peux conquérir le monde. Je fends la foule, les gens s’écartent sur mon passage… en ont-ils conscience ? Cette machine à sons, humaine, dans mes oreilles. Il y a dans mes yeux cet éclat impitoyable. Je suis déesse parmi les hommes.
Certains m’interpellent, ils me demandent pourquoi mes pupilles ont des éclats grenat. Mon sourire acéré suffit généralement à décourager les plus curieux.
Je reste persuadée que l’un d’eux, noyé dans leur nombre, m’attend.
Je voudrais placarder les murs de son visage et lui hurler que je l’attends, encore et encore, encore et encore, mais certaines choses sont impossibles. Même pour moi. Qui qu’il soit, loup, dragon, humain fragile, je le prends tout entier. Je lui suis destinée, nos destins sont plus inextricablement liés que deux liens noués pour ne former plus qu’un.

Mercredi 14 janvier 2009 à 19:51

 

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Ce matin, j'ai croisé Antony.
Hypra-sex, comme d'habitude.
Dommage que son T-shirt dépasse de son pantalon.
Sérieux, comment peut-on être aussi beau et aussi peu fashion ?
Il a vraiment besoin d'une copine pour le conseiller. Moi, par exemple.
Des vêtements top fashion, voilà ce qu'il lui faut pour Noël. Je crois que je vais faire un petit tour à Carrefour, rien que pour lui (Je vais pas me ruiner pour lui non plus ! L'année dernière, il m'a offert une écharpe à seulement 30€. Il a oublié d'enlever l'étiquette, je précise.).
Franchement, comment un PB (Paradiz Boy of course) pareil peut-il ne pas avoir au moins un ami pour lui dire de s'habiller avec autre chose que des toiles de jutes ? Sans déc, son fut ressemblait comme deux taches d'encres aux sacs à pommes de terre sur le marché (Ma mère en a ramené un kilo hier. Je n'en ai pas mangé. Prendre cent-cinquante grammes ? Je ne veux pas virer obèse !)
Trop abuser quoi.
Mais bon, je m'en fous, il est pas à moi, ce n'est pas à moi qu'il collera la honte demain sur les Halles.
En parlant de cadeaux de Noël, c'est la ga-lère mais totale quoi.
Entre ceux qui croient que mes vieux me bourrent de thune (oui, et alors ?) et ceux qui savent paaaaaaaaas, même le 26 décembre ils savent toujours pas et ils se plaignent de recevoir juste une carte. J'vous jure.
J'ai déjà assez à faire avec les listes que je distribue à tout le monde pour pas me creuser la tête quoi, c'est pas fashion.

J'ai vu E. ce matin. Trop fashion le gars. Il m'a demandé ce que je voulais, entre deux pelles devant son hystérique d'ex.
Je comprend pas pourquoi elle s'est vener comme ça cette pouf, elle a ses petites affaires ou quoi ?
Ca m'étonnerais pas, elle avait un fut noir pas fashion.
En tous cas, c'est pas parce que j'ai arraché son mec de ses bras pour me ventouser à sa bouche sous son nez (oui, sa bouche était sous son nez. Plutôt fashion nan ?) que je suis une vamp et une briseuse de couples fashions nan ?
Bref, j'ai dit à E. que j'en savais rien en criant pour couvrir les hurlements de l'irascible pétasse.

Par contre, je sais toujours pas quoi lui offrir. Parce que je pourrais lui acheter du Lacoste, comme à tous mes ex (on ne change pas une équipe qui gagne), en plus si on casse ça peut resservir (je suis jamais restée plus d'une semaine avec le même, mais il embrassait bien quand même) mais j'aurais préféré un truc un peu plus perso quoi.
Oh, j'y pense. Il m'a parlé, de speed en passant, d'un sweat-shirt Quicksilver vraiment fashion.
À bien y réfléchir, il m'en a parlé sept ou huit fois, il a dit qu'avec le cadeau qui me prépare il a plus de thune pour se l'acheter alors qu'il n'en reste plus qu'un à sa taille, il m'a emmené trois fois le voir dans la vitrine (et essayé deux fois sous mes yeux), il m'a dit quatre ou cinq fois sa taille et il me l'a montré quatre ou cinq fois sur catalogue.
Oui, je crois que c'est ce que je vais lui payer, mais je pense pas que ça lui plaise mais bon... Sait-on jamais...


 

Narcissiquement votre : Anaïs

 

P.S. J'ai mis le dernier Elle dans le sac de E. Vous croyez qu'il comprendra que c'est le sac top fashion page 45 que je veux ?
Nan parce que j'ai juste corné la page, arraché les autres pages mode, barré les autres articles de la page, entouré la pix du sac
, souligné les notes de bas de pages correspondantes et noté au stabilo rose « Je le kiffe trop trop trop mais qui pourrait me l'offrir ? »
Le problème avec les mecs, c'est qu'il faut tout leur dire.

P.P.S. Ah merde ! Je viens de me souvenir ! Le sweat-shirt, c'est Steph qui me l'a réclamé. J'ai la flemme de réfléchir pour E., allez au Lacoste comme les autres.
De toute façon, Steph bave moins.

Mercredi 14 janvier 2009 à 19:40

 
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Quatre femmes identiques me tendent quatre prospectus identiques d'un geste automatique.
- Vous êtes dans une impasse ? Vous ne savez quelle alternative choisir ? Clonez-vous et vivez vos sept vies sans regret ! Venez nous voir ! Chez ***** sept vies garanties sans tares sournoises !

La nouvelle tocade.
Dans la rue, impossible de savoir si on a à faire à un clone ou à un original. Tout le monde s'en fout. Les jumelles, triplettes... font leur shopping de concert et s'arrachent mutuellement leurs trouvailles. Un café fait fureur, « Mère, fille et clones », on clame à l'émancipation de la femme, la scandale dont il a fait l'objet (mère et fille ont chacune un clone travaillant dans une entreprise au cas où le concept ne marche pas) n'a pas découragé la clientèle. Au salon, les clientes discutent de la nécessité de créer ou non une nouvelle copie, de peur de « gâcher une vie ». 7 vies, 6 clones. Il fallait bien poser une limite.

Une loi est passée récemment d'ailleurs, malgré les lobbies. Maintenant, il ne s'agit plus qu'un original n'ait pas plus de six clones vivants, on ne peut pas en créer plus de six, c'est plus humain. Mais il y en a toujours pour détourner le système, pour aller dans des paradis clonales...

Je soupire et me présente face à la porte vitrée qui s'efface sans bruit pour me laisser entrer. La morsure de l'air climatisé me surprend.

Trois hôtesses d'accueil semblables m'accueillent d'un bonjour monocorde.
Les clones aiment bien exercer la même profession que leurs originaux. Et les originaux garder un œil sur les copies. Ça arrange tout le monde de vivre sept vies identiques. Parce qu'au fond, on est pas trop prêts à prendre des risques. Le cocon quotidien est tellement plus rassurant.

De toute façon, pour une entreprise pareille, c'est une question de crédibilité.

- Je voudrais me faire dupliquer six fois. S'il vous plait.

Intense surprise et bouche en cul de poule synchronisée. Les gens ne sont pas censé gâcher leurs six possibilités d'un coup. Sauf moi.
Je pourrais expliquer. Mais pourquoi perdre un peu plus de temps ?
Je me contente d'ajouter, comme une explication :
- Je veux vivre mes sept vies.
Tranquillisées, elles haussent les épaules et vaquent à leurs occupations, l'une d'elles décroche le téléphone et après quelques instants m'annonce gracieusement que « le docteur ****** (pas compris qui) est disposé à me recevoir, si je veux bien me donner la peine de... » Trop aimable.

Je me méfie des médecins, ces arrivistes qui surfent sur la vague du clonage (thérapeutique, esthétique, loisir...). Les gens manquent de soins parce qu'ils finissent tous par être débouchés par un laboratoire ou une clinique.
Au fond, tout est corrompu. Et ces clones sont les plus pourris.
Je ne sais pas qui je déteste le plus. Clones. Médecins. Tout se vaut.
Je veux comprendre.

Je patiente dans une salle tapissée de reproductions d'Andy Wharold.
Derrière un bureau, le clone de l'hôtesse d'accueil. Je me demande si les employés ont des dérogations.

Le docteur finit par ouvrir la porte, une femme enceinte en sort. Je ne veux pas savoir qui elle veut faire cloner. Et pourquoi.

Le médecin suspend mes réflexions en m'invitant avec insistance à entrer.

Il est immonde. Non qu'il ait pu me paraître autre. Des manières doucereuses. De toute façon je ne suis pas prête à l'apprécier.

- Asseyez-vous je vous en prie. Quelque chose à boire ? Thé, café ?... Non ? Bien, qu'est-ce qui vous amène ? Un clonage, je suppose.
- Oui. Six exemplaires.
- d'un coup ? C'est original. Vous m'excuserez, j'ai besoin de votre carte d'identité, pour vérifier que vous êtes bien « vierge » de toute copie... Le gouvernement est très vigilant là dessus vous comprenez... Des contrôles très pointus... Merci... Bien... Vous semblez en règle... Non pas que j'ai douté de votre bonne foi, bien sûr... Mais il y a des clientes... Des obsessionnelles. Il y a un nom, c'est un syndrome qu'ils ont identifié il y a quelques mois... Je peux vous demander votre projet ? Pour les clones.

Devant mon regard noir.

- C'est la procédure.

Je suppose que je ne peux y échapper. Je répond posément

- Je vais mourir.
- Maladie dégénérative non-génétique, je suppose ?
- Oui. J'imagine qu'il y en aura bien une sur les six qui me survivra.
- J'y compte, nous faisons des clones en bonne santé Mademoiselle. Je me dois tout de même de vous rappeler que votre individualité, votre conscience propre, s'éteindra avec vous. Clones ou pas.

Bizarre ce médecin. Il me prend pour une imbécile ? Je le gratifie d'une seconde œillade meurtrière, il hausse les épaules, l'air de dire « c'est la procédure ».
Avec un peu de chance, il finira bien par tomber raide mort avant la fin de l'entretien. Aucune importance, il y aura sûrement un clone qui sortira du placard pour le rmeplacer.
Peut-être même ai-je à faire à un clone.
Je déteste cette société où on ne sait plus si on s'adresse à des humains ou à des facsimilés !
Je ne nie pas que les clones soient humains. Mais ils ne seront jamais au même niveau que leurs originaux.

- C'est mon travail. J'aurai besoin de détails sur votre maladie, lorsque nous procéderons à la copie. Pour minimiser les risques. Quelles caractéristiques souhaitez-vous donner à vos clones ?
- Pardon ?!?
- Oui, certains clients demandent à ce qu'on maximise ou inhibe certaines particularités des futurs clones. Par exemple, rendre leurs capacités inférieures pour « garder le contrôle ». Ou bien encourager certaines tendances en vue du projet auxquels ils les destinent. Par contre, je vous préviens que nous ne touchons plus à l'apparence. Cela crée trop de problèmes, des rivalités entre les clones et les originaux...
- Je les veux comme moi. Exactement.



Mercredi 14 janvier 2009 à 19:13

 
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Il est venu me trouver alors que je guettais une proie, immobile au creux d’un arbre. Il me semblait que j’étais plus vieille que le monde, il me semblait que je n’avais jamais rien été d’autre que cette machine à tuer.
Il s’est mis à me parler en cette langue commune que je croyais avoir oublié. Il me dit qu’il me cherchait, qu’il m’avait toujours cherchée, et que j’étais là à présent.
Si mes reflexes n’avaient pas été aussi aiguisés, il est certain que j’aurai chu du mon perchoir.

Il me scrutait tandis que je montrais les crocs.
« Quel est ton nom ? »
Je ne savais plus. Que signifie un nom lorsqu’on est seule ?
« Ils m’appellent Phobos. Veux-tu être Callisto ? Ce nom en vaut bien un autre. Viens avec moi. Tu n’es plus seule. »
Il tendait la main, je ne savais comment réagir, je ne savais plus parler.
Il a trouvé les mots pour parler à mon humanité endormie, il m’a convaincue. Il a prit un temps infini pour que je retrouve ce que j’avais perdu.
Voilà mon histoire.

Il n’est pas comme moi, il a été transformé par un Wampyr puis abandonné. Il ne lui en tient pas rigueur. C’est quelqu’un de bon. Il est plus humain que bien des mortels.
Nous sommes comme vous, nous avons besoin de quelqu’un pour affronter l’éternité. Et il m’a trouvée.
Nous ne sommes pas comme vous.
Je passe des décennies sans voir son visage. Il ne me manque pas.
Je sais quand il a besoin d’être seul, il sait quand me retrouver.
Le monde est trop petit pour nous deux.
Vous ne comprenez pas ? Je m’y attendais.

Je ne vous conterai pas une aventure avec un mortel, une relation condamnée d’avance, Tristan et Iseult condamnés à la mort… C’est d’un commun.
Certaines choses ne peuvent être dites. Les Wampyrs ne sont pas très adroits avec la tristesse.

Je vous aime, mortels. Je vous méprise pour cette raison, j’aime cette fragilité en vous. Je vous envie car vous êtes condamnés à affronter la mort. Moi, j’avais trop peur. J’ai trop peur pour l’éternité. Je refuse de m’éteindre. Je refuse de disparaître.

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