Lundi 25 juin 2007 à 13:35
Au reste, comment être objective ? Elle m'a tout de suite plue, et aujourd'hui encore…
Pardon. Je ne dois pas avoir de telles pensées, pas maintenant, je…
Elle m'a toujours apparue… comme une sorte d'ange de justice descendue sur terre, abordant fièrement son casque et son bouclier rutilants, révoltée (rien ne l'insupportait tant que la légion des maux qui effleurent la surface de notre petite planète).
Il y avait en elle cette pureté, sous les allures d'Amazone qu'elle se donnait.
Elle nous éclaboussait de lumière.
Oui, elle était belle.
Pas dans l'harmonie de ses traits ou la finesse de sa silhouette, non. Elle l'était par son sourire, par ses gestes imprégnés d'une certaine grâce un peu brusque (comme si elle cherchait à noyer la douceur de ses mouvements sous un carcan de dureté, sans y parvenir tout à fait), par son rire cristallin, sa mine toujours inquiète face à la douleur -jamais la sienne- (c'est l'être le plus rempli d'empathie que j'ai connu), quand elle craignait d'avoir blessé quelqu'un.
Elle l'était par ses manières résolues, son entêtement contre vents et marées.
Elle l'était par les baisers qu'elle déposait sur ma joue, comme un trésor, lorsque nous n'étions pas seules.
Et ses yeux… Gris parle, hachés de brume trompeuses et d'eaux traîtresses, marécages nocturnes, je m'y égarais avec délice.
Je me souviens de ses gestes, de sa façon de porter hâtivement sa cigarette à ses lèvres et d'en tirer une longue bouffée, comme une excuse. Je me souviens de sa manie de passer ses doigts dans ses cheveux blonds et bouclés, les y emmêler avec indifférence, lorsqu'elle se noyait dans ses réflexions. Je me souviens de ses étreintes... des moments où elle me prenait dans ses bras et de rester ainsi, figée presque, une éternité, jusqu'à ce que tous les battements désordonnés de mon coeur s'éteignent dans un sourire.
Elle avait ce pouvoir.
Combien de temps dura notre histoire ? Deux mois ? Trois mois ? Six peut-être ?
Il me semble pourtant que c'était une éternité...
Et c'est moi, j'ai...
Alors pourquoi suis-je encore… si triste ?
Lundi 25 juin 2007 à 13:34
Combien de fois suis-je allée la retrouver dans un de ces cafés qu'elle affectionnait tant ?
Oui, je me souviens… Je me souviens ces bars saturés d'étudiants fades, le plus souvent, et elle parmi eux. Elle m'attendait depuis longtemps déjà, ou peut-être bien mon arrivée n'était qu'un incident au sein de son après-midi de lecture et d'oisiveté délicieuse. Je la retrouvais perdue au milieu de volutes de fumée (elle avait toujours une cigarette à la main, bien qu'elle ne semble jamais la porter à ses lèvres).
Parfois, par jeu, par… je me postais, debout au milieu du ballets des serveurs, des clients, à braver le flot à quelques mètres de sa table, j'observais ses yeux se perdre dans les nuages gris. C'était étrange de la voir là, toute seule… calme soudain et comme… apaisée, tellement loin de son effervescence coutumière.
Et nos regards se croisaient et… jamais plus on ne m'a offert de tels sourires.
Lundi 25 juin 2007 à 13:33
Je n'oublierai jamais l'odeur de ses paquets de cigarettes.
Les cigarettes en elles-mêmes, cela fait bien longtemps que j'en ai égaré le parfum –toutes les fumées se ressemblent.
Mais cette odeur, cette odeur de tabac un peu sucrée –elle fumait de ces cigarettes multicolores, au papier et au filtre bourré d'additifs olfactifs pour noyer l'âpreté de la fumée sous une vague de barbe à papa ou de chocolat.
Encore aujourd'hui, il m'arrive d'acheter des paquets de ses cigarettes, comme ça, par nostalgie.
Vladimir se moque de moi, à me voir accumuler ces paquets que je ne consomme pas : à présent, je les cache dans le dernier tiroir de mon bureau, tout au fond, comme s'ils représentaient je ne sais quel passe-temps honteux et malsain.
Il m'arrive même d'en allumer une, juste pour avoir le plaisir d'apercevoir son visage s'élever des colonnes grises.
L'odeur de ses paquets de cigarettes, c'est tout ce qu'elle m'a laissé.
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