Vendredi 9 juillet 2010 à 21:21

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Andréas
Je te promets, un jour je cesserai de jeter des bouteilles à la mer.
J’ai appris la nouvelle (comme si je ne pouvais t’échapper, aussi loin que tu sois, des kilomètres et des kilomètres…), j’ai appris pour ton divorce. J’espère que tu vas bien.
Comme toujours, j’en suis bouleversée, bien plus que je ne devrai.
Mon cœur bat la chamade et je voudrai traverser le torrent qui nous sépare, échanger quelques mots, te prendre enfin dans mes bras, où que tu sois.
Mais je ne peux pas, tu sais que je ne peux pas. C’est toujours la même histoire, c’est toujours le même refrain. Nous avons un talent certain pour nous manquer, encore et encore.
Je te déteste, je te déteste à cause de ce pouvoir que tu as sur moi, sans jamais n’avoir rien fait pour l’affermir, je te déteste de me chambouler ainsi alors que je n’ai pas le droit.
Te savoir heureux en ménage me rassurait, au moins rien n’était possible, tu ne pouvais plus m’atteindre, et parfois même j’étais contente pour toi.
Te savoir libre teinte mes lèvres de remords, toujours ce goût amer d’avoir gâché notre chance…
À nouveau tu es libre et nul signe de toi, aucun sémaphore à l’horizon, je me fais surement des idées, tu n’as plus envie de moi, tu n’en as jamais eu envie. Nous pourrions être deux, peut-être, au fond je crois qu’il me suffirait d’un mot de toi, mais je ne t’entends pas, je ne sais même pas où tu es.
Tu es libre et le pont a brulé, je ne veux pas croire que ce soit pour toujours, que nous deux se conjugue au « jamais plus », je ne peux pas croire que je suis la seule à m’assoir sur la rive à murmurer ton nom à l’écume.
Et pourtant, si je te voyais sur l’autre bord, avec ton sourire indolent, comme si ça n’avait pas d’importance, comme si tu savourais ta victoire, ce serait pire encore, si nous nagions l’un vers l’autre, si nous nous noyions ensemble…. C’est toujours la même histoire, le même refrain, il y a un choix que je me refuse à faire.
Andréas, je t’en prie, envoie-moi une bouteille même vide de tout message, dis-moi que tout cela a un sens, dis-moi que je ne suis pas la seule à suffoquer sur les berges. Je ne parviens ni à traverser la rivière, le fleuve, l’océan entre nous (peur d’être vulnérable, peur de perdre pied) ni rentrer dans ce foyer où on m’attend, où on m’attendra peut-être toujours.
Andréas. Ecris-moi.

Vendredi 28 mai 2010 à 9:27

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Andréas. Hantes-tu mes pensées par désœuvrement ou par regret ?
L’asphalte résonne encore du son de tes pas et pourtant il n’y a rien à attendre. Je me retiens de dévorer les pages de l’annuaire en quête de ton nom, décrocher le téléphone et chuchoter ton nom dans le récepteur. Je suis sûre que tu ne t’inquiètes pas, tu sais que je suis lâche.
Je repense à ton sourire, à jamais spécial à mes yeux, à ce salut léger dont tu m’as gratifiée lors d’un rencontre de hasard.
Ce pont où tu m’as regardée, pour la dernière fois sans doute, cette entrevue muette, deux êtres qui se croisent, qui se frôlent furtivement, une rencontre manquée, et déjà il faut regagner la rive. Comme d’habitude.
Tu es parti, tu as enflammé la passerelle comme tu as marqué ma peau au fer rouge, comme tu as gravé ton nom dans mes veines.
Alors je voudrais décrocher le téléphone et hurler « tu crois vraiment que nous n’étions qu’une rencontre de hasard ? Tu crois vraiment que ça n’en valait pas la peine ? » et tu me trouverais bête de me rapprocher à cette espèce de destinée que j’ai imaginé, tu reposerais le combiné en souriant, tu te dirais que j’étais quand même une drôle de fille, et ta femme te demanderait ce qu’il y a de si drôle alors tu la prendrais dans tes bras.
Alors je piste ton ombre à travers la ville déserte, les rues murmurent ton nom mais elles ne me renvoient que l’écho de ton absence. Et ce pont, la nuit où pendant quelques instants j’ai oublié le monde et mon cœur a battu au rythme des syllabes An-dré-as. Un bref sourire, un signe de tête. J’ai continué à avancer et le monde a repris ses droits, éclatant à mes sens : ton regard m’a transpercée.
La prochaine fois qu’il te viendra à l’idée d’allumer un brasier, assures-toi que je sois au centre. J’aurais tant voulu être avec toi. Au moins une fois.

Jeudi 1er avril 2010 à 21:59

Je craignais son regard, devant lequel je me sentais nue, non qu’il fut particulièrement perçant ou scrutateur, mais parce qu’après ces années à le désirer, je n’avais pas appris à m’en défendre, j’étais la proie impuissante de ses yeux, je lui aurais donné tout donné, ma tête sur un plateau d’argent pourvu qu’il la veuille. J’étais nue devant ses regards, au lieu de lui sourire et de détourner la tête avec grâce lorsqu’ils se croisaient, je lui ouvrais la porte de mes iris, captive, tentant vainement de deviner ses pensées, tambourinant à ses pupilles, laissant mon âme à sa merci. Mais peut-être ne me regardait-il pas, peut-être que son regard se contentait de se perdre et croisait le mien par accident. Je ne le saurais jamais.

Samedi 27 mars 2010 à 12:52

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Andréas.
Cette fois, c’est fini pour de bon. Tu déménages, tu désertes mon univers, c’est ta mère qui me l’a dit, elle appelle parfois, pour prendre de mes nouvelles… quelles nouvelles ? Je ne suis pas à ma place ici, il fait trop beau, printemps et renouveau… Je sens la morsure du vent de décembre sur ma peau.
J’aimais croire que tu étais virtuellement présent, j’aimais imaginer que nous pourrions nous croiser au détour d’une rue, passer sous tes fenêtres parfois et y deviner ta silhouette, m’assoir sur le banc d’un parc où nous aurions dû aller et guetter tes contours dévalant les allées, pour me rejoindre. Enfin.
Nous avons consciencieusement gâché notre présent ensemble mais je me plaisais à rêver qu’il n’était peut-être pas trop tard.
Parcourir ces rues vides de toi…
Sans doute tu penses que ton départ est la meilleure chose qui puisse m’arriver. Pour TOURNER LA PAGE.
Ton absence a le goût d’une occasion manquée, on oublie pas si facilement quelqu’un qui s’est logé sous la peau. Cet engrenage nous a entrainés loin l’un de l’autre. Se manquer. Pour toujours. Car tu ne reviendras pas. Comment pourrais-tu ?
il n’y a rien entre nous, même pas de mot, rien que ce fil qui vibre en me disant « il est fait pour toi » et tu pars, le fil est coupé, mes jambes cèdent.
Tu ne reviendras pas, la flèche du temps ne revient pas sur ses pas.
Je continuerais à t’appeler dans la densité du silence, je chuchoterais ton nom au vent de décembre.
J’enverrais des bouteilles pleines de mes regrets, dis-moi que tu les ouvriras, que tu laisseras s’exhaler leur parfum amer et capiteux, dis-moi que je suis le souffle que tu entendras dans le vent de décembre, que nous aurions pu être faits l’un pour l’autre. Dis-moi que tu penseras toujours moi. Ce serait comme si on était un peu ensemble.

Vendredi 5 février 2010 à 22:00

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Elle avait parlé de ça lors d’une interview, c’est vrai. Ça lui avait échappé, elle l’avait évoqué distraitement, cela faisait plusieurs années qu’elle n’y avait plus pensé. Elle avait trop brûlé pour lui pour lui pour qu’il en reste plus que des cendres lorsqu’ils s’étaient perdus de vue, d’ailleurs pourquoi seraient-ils resté en contact ?
Elle le rejoignait en se demandant comment il était tombé sur l’interview, c’était un petit magazine confidentiel, elle n’en avait jamais entendu parler avant d’être contactée par l’un de leurs journalistes.
Il avait dû tomber dessus par erreur. Ou bien quelqu’un de leur passé commun l’avait prévenu, mais qui ?
Ça lui ressemblait bien, d’appeler un matin, après des années de silence. Dans sa surprise, elle avait oublié lequel des deux avait proposé une rencontre. Elle se sentait aussi désarmé qu’avant en sa présence.

Il était là, assis à une table, il n’avait pas changé, il s’était juste fait pousser les cheveux, évidemment.
Elle se demandait s’il était reconnu dans la description dans la description éthérée qu’elle avait donnée dans l’article. Elle avait utilisé ce vieux nom de code, celui qu’elle chuchotait à l’oreille de sa camarade de l’époque pour signaler les quelques menus échanges, les frôlements, les regards en biais. Chronique d’un duel ordinaire.
Il aurait pu se reconnaître, facilement sans doute. Elle l’aurait su s’ils avaient pris le temps de régler leurs comptes. Peut-être avait-il pensé que ça n’en valait pas la peine, peut-être fallait-il conserver la magie, alors elle ne savait pas à quoi s’en tenir, elle n’avait jamais su.

Elle s’assit à son tour, un peu timide, elle se sentait d’autant plus fébrile qu’elle ne savait pas ce qu’il attendait, lui. Mais il avait la parole facile alors ils échangèrent quelques détails, rattrapèrent le temps perdu, quelques années furent disséquées entre deux verres. Cette fois, c’est lui qui l’invita, comme une réponse à des années d’écart. Ils parlaient, les mots se confondaient, les vieux souvenirs éthérés et les récents. Il toucha la cicatrice qu’il lui avait faite sur la main, écho lointain d’un jeu, elle était presque effacée mais il s’en souvenait. Elle aimait bien quand il se souvenait, ça lui donnait l’impression d’avoir compté. Il lui caressait le dos de la main d’un air absent. C’était peut-être le signal, peut-être que ce n’était rien, il se leva et se pencha vers elle. C’était le rendez-vous à conjuguer au passé, celui qu’ils auraient dû avoir, celui qu’ils n’avaient cessé de manquer.

Ils étaient dans une chambre d’hôtel, ils rattrapaient le temps perdu, c’était parfait et un peu maladroit, comme cela aurait dû l’être.
Au matin, elle se réveilla la première, satisfaite d’être celle qui aurait le choix, celui de partir sans faire de bruit ou de rester encore un peu, celle qui aurait à dévoiler ses cartes.
Elle ne savait pas ce qu’il attendait d’elle. Les corps avaient parlé et pourtant c’était plus qu’un corps-à-corps, c’était plus important que ça, et pourtant elle ne savait toujours pas ce qu’il y avait à attendre de lui. Alors elle se rhabilla dans le noir, fit monter un petit déjeuner qu’elle laissa sur la table basse, avec un mot en courant d’air, un mot en suspension. Elle ne savait même pas s’il y avait de la place pour elle.
Après tout, c’était une nuit qui ne comptait pas : c’était la nuit qu’ils avaient partagée quelques années plus tôt, la consécration d’un lien qu’elle n’expliquait pas mais qui était là, tendu entre eux, et qui vibrait encore. Pas de l’amour. C’était plus grave que ça.

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