L'Eglise a toujours condamné la vanité. Au XXIème siècle, elle a enfin mis la main sur le bras armé pour la combattre : les salons de coiffure.
Il vous appâte avec des publicités, des slogans tels que "en matière de cheveux, rien n'est impossible". Oui, mais à quel prix ?
Les salons sont proprets, design et les fauteuils confortables, on vous y attire comme les plantes carnivores attirent les insectes avec des phéromones, vous faisant miroiter la perspective de deux heures de détente à se faire bichonner. Mais ce n'est qu'un leurre.
Vous vouliez juste vous faire belle, changer un peu. Vous étiez innocente. La vie n'a aucune pitié pour ces gens-là.
On commence par vous faire un "gommage" après que vous ayez choisi votre nuance. Ca sonne bien, on se croierait chez l'esthéticienne pour un soin du corps, agréable et doux.
En pratique, ce n'est pas un simple coup de gomme mais une dissolution à l'acide.
On vous laisse baigner le crâne dans une pâte corrosive pendant deux longues heures, des vapeurs asphyxiantes émanent de votre toison capillaire et vous prennent aux sinus lorsque vous oubliez de réfléchir par la bouche.
De temps en temps, une énergique friction vous oblige à pencher la tête en arrière et achève d'emmêler votre crinière.
Vous n'avez jamais eu aussi mal aux cheveux.
Enfin, on vous rince et un shampoing bienfaisant emporte la combustion. Mais c'est temporaire.
Vous croyiez qu'après deux heures, vous en avez fini, qu'il ne reste plus qu'à couper les pointes avant qu'on vous rende votre liberté. Vous n'avez pas encore compris l'essence du salon de coiffure, un long tourment.
Tout d'abord, on vous sèche les cheveux et pour accélérer les choses on les brosse par la même occasion. Malheureusement la tenue du sèche-cheveux inflige un malus de -5 en dextérité et -3 en douceur. C'est simple, on dirait qu'après vous avoir décollé le cuir chevelu avec le vitriol, elle cherche à vous arracher le scalp. Cette harpie s'y prend comme un troll, tirant de toutes ses forces sur le peigne planté dans le nœud qu'elle a fait avec vos cheveux. Elle a des ennuis au boulot, vous êtes son punching-ball.
A ce stade, ils ont de la paille l'aspect et la couleur. Elle ne se rend pas compte que vous vous retenez de pleurer de douleur, en tortionnaire aguerri.
Sournoisement, on vous remet par surprise du colorant et vous comprenez que non seulement vous en avez encore pour au moins une heure, mais qu'en plus vous en aurez pour 30 bonnes minutes de calvaire (la blessure de votre peau reprend du poil de la bête). Avec un semblant de sollicitude, la coiffeuse vous demande si ça ne pique pas trop (la garce). Dans le cas contraire, elle vous laisse sortir avec vos cheveux platine ? Vous ne pouvez même pas exprimer votre affliction, c'est vous qui l'avez demandé.
Le reste se déroule comme dans un rêve, vous êtes anesthésié par la douleur.
On vous fait un léger massage des tempes, on prend enfin soin de vous mais il est trop tard. Il ne vous reste plus qu'à simuler le ravissement devant le résultat final, vendre un bras afin de régler la facture, et enfin vous pouvez prendre vos jambes à votre cou.
Non, ça ne nous plait pas.