Elle avait quitté son air abandonné, elle avait décidé d’être sage. Elle ne pouvait cependant emprisonner le regret au fond de ses iris. « Tu crois qu’un jour il y aura un temps pour nous ? ». Il l’étreignait vivement, c’était un couloir défraichi où les élèves refluaient, la pause n’était pas encore achevée, elle s’abandonnait contre lui, entendre son cœur battre à défaut de les posséder. Ils se séparaient, faible lueur de printemps (encore en demi-teinte). Elle effleurait la poitrine d’Andréas du bout des doigts en lui disant « garde une place pour moi » voix rêveuse ses traits étaient fermes, résignés.
Elle tournait les talons mais il saisissait sa main entre les siennes, avec fougue. Elle se retournait (triste ? étonnée ? pleine d’espoir ?). Sans se concerter, ils firent quelques pas pour se retirer du monde.
Ils se jaugeaient, Andréas tenait toujours la main de la jeune femme.
Elle voulait s’avancer et palper ses courbes et ses arrêtes à travers la chemise de zéphyr, elle voulait le posséder un peu. Elle voulait deviner sa peau, comme on examine un cadeau encore prisonnier de l’emballage. Elle voulait savoir de quoi il était fait, comment il était bâti, le découvrir lentement.
il se tenait devant elle, il rayonnait d’une lueur vacillante, elle craignait que les accidents ne les séparent, sans doute à force de la manquer il allait l’oublier. Toutes ces contraintes qu’on s’impose. Elle rêvait d’eux mais elle n’était pas de nature à renoncer, pas à moins d’être acculée, pour lui elle se sentait au-delà des règles mais au fond elle savait qu’il ne méritait pas le second rôle, elle savait qu’elle ne pourrait être double. Mais elle rêvait, elle rêvait de lui.
Elle aimait croire qu’ils se comprenaient à demi-mots mais il restait une énigme.
Lentement, elle tombait –elle l’avait bien cherché, elle s’enfonçait dans le sommeil.
Elle rêvait de lui presque toutes les nuits.