Les yeux du gardien tremblent et sa peau vacille.
- Mais vous n’êtes pas…
Je finis ses mots pour lui, afin de ne plus l’entendre caqueter un instant de plus.
- Morte ? Mais qu’est-ce que vous avez tous avec cette question ?
Une balle entre les deux yeux. Il me rappelle mon oncle Antoine. Les murs me mentent mais je ne suis pas folle, cette certitude me vrille les temps.
Némésis, je me trace un chemin à coups de balles. Le sol se moque de moi, il change leur sang en lave, mais je ne suis pas folle, je ne suis pas dingue, cela me tuera mais je porterai cette conviction en bandoulière jusqu’à ce qu’ils m’achèvent.
Ce monde est fou, hostile, les barreaux me jettent des œillades mais je ne céderai pas, j’ai toute ma raison et je connais la vérité. Personne ne me perdra plus longtemps.
Je plonge dans les douves, couleur vert glacé, j’explique à ma conscience que je voudrais revenir ici pour les vacances, tout cela est parfaitement harmonisé avec mon sang, je le vois à travers ma peau. Je ne suis pas folle, je rie, je me glisse sous la surface, je dis aux poissons qu’ils devraient essayer, c’est fascinant. Je suis une sirène, on me l’a caché mais je l’ai toujours su. Je ne suis pas folle. Je vois mes gestes en saccadé brasser des torsades aigue-marine, mes cheveux dansent et ondulent, avez-vous jamais vu pareille beauté ? L’immensité aqueuse est d’un céladon opaque. Le clair du Lune s’éloigne tandis que je me dissous, je ne suis pas folle, je n’ai pas peur, l’eau m’étouffe mais tout va bien.
Je ne suis pas folle. Souvenez-vous de ça.