A.
J'aurais aimé te voir, plutôt que t'écrire. J'aurais surtout aimé que tu saches qui je suis (que tu te souviennes de qui je suis).
J'aurais aimé te parler, ce soir-là. J'aurais aimé te séduire.
C'est étrange, n'est-ce pas ? Cette impression que certains peuvent laisser.
Ton visage se perd dans les abysses, j'essaye de reconstituer le puzzle disparate de ton sourire (éclair de cheveux blonds, un peu longs, un peu des traits de ton frère, des yeux bruns…)
J'aimerais tellement pouvoir me dire qu'un jour, je te reverrais.
Je ne sais pas très bien pourquoi je t'écris.
Au fond, je n'ai rien à te dire.
Ce n'est pas comme si on était amis.
Ce n'est pas comme si on se connaissait.
Ce n'est pas comme si on avait parlé (comme si j'avais osé te parler).
Et pourtant…
Je ne sais pas très bien pourquoi je t'écris, je ne sais pas très bien ce que j'espère.
Toi non plus, n'est-ce pas ?
Pardon pour tout ce temps que je te fais perdre, pardon pour tous ces mots qui ne signifient rien pour toi, pardon pour tout.
Pardon de m'imposer. Pardon d'exister.
Je crois que je te voudrais. Je voudrais t'avoir.
C'est obscène, n'est-ce pas ?
Je veux te revoir, te connaître, perdre du temps avec toi, beaucoup de temps, te parler encore et encore, t'embrasser, et puis…
Fascination. C'est dans vos gènes, il paraît.
Je voudrais tellement de toi.
Et moi. Qu'est-ce que j'ai à t'offrir.
Mes silences, mes attentes et mes impatiences, du vide et de la timidité. Je ne suis pas comme toi.
Pas vraiment la femme idéale, tu vois.
Oublie.
Oublie tout ça, oublie moi, si seulement j'avais survécu dans ta mémoire.
Oublie cette lettre, cette lettre bizarre et lacunaire, insignifiante, cette lettre qui ne dit rien et qui en dit trop.
Je ne sais même pas pourquoi je t'écris.
M.