Jeudi 5 juillet 2007 à 22:52

Les gouttes tombent. Dehors. Moi ça va, je suis bien au chaud. Dedans.
Il y a quand même quelques inconscients pour rester braver la pluie. Quelques inconscientes.
Les cheveux détrempés, la capuche pendant dans son dos, ses traits gravé d'une attitude de défi, elle est ridicule.
Elle l'attend.
Yuu arrive enfin.
Elle ne court pas vers lui. Ca fait longtemps qu'elle ne court plus.
Il arrive à sa hauteur, il la dépasse, il ne se retourne même pas. L'idiot. Sait-il seulement qu'elle est là, qu'elle existe et qu'elle l'attend ? Que je l'attends. Comme toujours.
Oui. Bien sûr que oui.
Il s'arrête, il se retourne, il éclate de rire, il la prend dans ses bras, il la fait tournoyer. Comme avant. Comme toujours.
Elle a les cheveux dans le vent, la tête dans les étoiles et le coeur loin de moi.
On m'a dit, loin des yeux, loin du coeur. Ils sont sous mes yeux. Leurs coeurs sont à des années-lumière. Si loin de moi...
« Bonjour Papa ! »
J'ai entrouvert ma fenêtre. Je suis jalouse... De qui ? Pourquoi ? Je suis folle.
« Bonjour ma tite Meiko chérie ! Tu vas bien ? » lui demande-t-il en la reposant délicatement sur la terre ferme.
Elle lui dédie son plus grand sourire. Celui qu'elle ne me fait plus depuis si longtemps...
Il lui prend la main et commence à faire la course avec les gouttes, en traînant la petite à sa suite, qui rit aux éclats, ravie.
Je ferme ma fenêtre et laisse retomber le rideau.
Je ne peux pas voir ça.
Je ne veux plus voir ça.
Je me retourne, je plaque mon dos au mur et je me laisse glisser jusqu'à être assise sur le sol.
La vitre est froide, le mur est froid, le plancher est froid, mon coeur est froid.
À force de tirer des plans sur la comète en envoyant mon coeur avec, il s'est perdu quelque part entre deux galaxies. Il y est resté.
Tant pis pour lui. Tant pis pour moi.
Meiko... Son nom même me fait mal.
Pourquoi me fuient-ils tous ?
Peut-être... peut-être que c'est moi qui fuis loin de moi...
Yuu... je ne veux pas penser à lui, je ne veux plus penser encore à lui, je n'ai plus le droit. Oublier. Oublier Yuu.
Tiens... Meiko... Elle a laissé son sac dans le couloir, comme toujours quand elle voit son père, elle ne l'a pas pris, elle ne travaillera pas aujourd'hui.
Mais Yuu, lui, va l'obliger à revenir, il va sonner, il va me regarder ouvrir la porte avec son grand sourire de mec bien et ses cheveux toujours en bataille Et Meiko... elle ne me verra même pas.
Alors je prends son sac, je le pose dans l'entrée avec deux pommes et deux serviettes (si ils ont faims...) dans un sac plastique.
Un mot : « Je sors faire une course. Bisous, Maman. »
Je rebouche mon stylo. Il tombe. Je ne le ramasse pas.
Je prends mon trousseau de clefs.
Yuu a toujours celle qui ouvre l'appartement.
Je n'ai jamais pu me résoudre à lui réclamer.
Comme si ici, c'était encore chez lui.
Je claque la porte d'entrée. Je ne ferme pas la serrure. À quoi bon ?
De toute façon, ma vie est un moulin où on rentre et dont on sort. Sans aucun souvenirs du moulin. C'est bien comme ça aussi.
Je cours. Loin. Loin de Yuu qui n'est plus à moi. Loin de Meiko qui n'est plus ma fille.
Loin de tout.
Si loin.... Comme les étoiles...

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