Et sur la table, il y avait une lettre. Cette lettre.
Cette table, je pourrais presque l'effleurer du bout des doigts, les paupières closes, aujourd'hui encore.
C'était la table de notre petite cuisine commune, elle communiquait avec toutes les chambres.
Personne n'y mangeait jamais.
Instinct de conservation, sans doute : je pense qu'aucun d'entre nous n'était en mesure de mitonner un quelconque plat comestible.
Mais moi, j'aimerai bien m'y asseoir, parfois.
Vous croyez vraiment que Célia l'ignorait ?
La lettre était posée là, sur le bord de la table. Comme par négligence. Comme par distraction.
Mais ceux qui connaissent Célia savent qu'elle n'agissait que très rarement par distraction. Très très rarement.
De qui était la lettre ? Quel était son contenu ? Professionnel ou personnel ? Ami ? Famille ?
Aucun de nous n'a tenté de le savoir, personne n'a ouverte cette missive qui nous narguait (bien qu'on puisse être sûr qu'aucun de nous n'a pu la manquer. D'autant qu'elle est restée quelques jours ainsi, avec ses lettres alambiquées et agressives délimitant le nom de Célia).
Vous savez, ce qu'était cette lettre, son essence, je veux dire (son encore et la facture de son papier, les sentiments qu'elle transpirait et les informations qu'elle cristallisait, son auteur…), ça n'avait aucune importance. Aucune.
Car tout ce qui comptait, c'est que Célia avait reçu une lettre. Et pas nous.
Désolée de vous imposer ça (si vous daigniez cliquer...)
Elle voulait surement vous narguer... Dans ce genre de cas, ça sert a rien de faire attention.
Pis peut-être que c'était une mauvaise nouvelle, finalement !