Après être devenue le plus grand écrivain que la Terre ait portée et avoir acculé mon tendre époux au suicide (Bill Gates, pour ceux qui suivent), quasi-maîtresse du monde, j’ai commencé à m’ennuyer un peu. Je sentais qu’il manquait quelque chose pour m’inscrire dans la postérité.
Que sert d’être quasi-maîtresse du monde si on se fait importuner par la musique de son voisin ?
Heureusement qu’il y a le métal pour couvrir ces babillages, travailler en écoutant des odes à la gloire du Maître, amplifiées par fée électronique...
Je regardais la tour Eiffel, l’éternel tache du paysage parisien inutile, lorsque j’eus l’illumination. Paris était destiné à devenir le Jérusalem du patron.
Je regardais la tour Eiffel, l’éternel tache du paysage parisien inutile, lorsque j’eus l’illumination. Paris était destiné à devenir le Jérusalem du patron.
Les idées venaient d’elles-mêmes, comme si elles n’avaient attendu que cette impulsion : je m’installerai avec mon agent littéraire et en moins de deux le quartier serait déclaré zone sinistrée, je pourrais dormir sans entendre la pollution sonore du voisin et tendre des tentures noires aux fenêtres de l’appartement pour y organiser des sacrifices de pigeons. Je prendrais le contrôle de ma boutique préférée, Gibert Joseph, et fini la couleur jaune pour le logo, noir c’est tellement mieux, enfin une grande librairie sataniste. La tour Eiffel, le pieu pour empiler nos trophées. L’arc de Triomphe, nouveau terrain de saut à l’élastique sans élastique, pour les hérétiques qui sont encore pour Dieu dans la rixe céleste. Il faudra repeindre le Sacré Cœur en noir. La Madeline serait notre temple, pourvu que cette petite sotte arrête de pleurer, et le Louvre notre sacristie, avec sa pyramide à 666 carreaux. La Seine serait notre Achéron et les cadavres flotteraient deci-dela jusqu’au Havre où ils trouveraient peut-être la paix loin de notre aura de destruction. Les rats se baladeront librement et il faudra céder le passage aux chauves-souris.
Bien sûr après les pigeons on passerait aux sacrifices humains, dommage qu’il n’y ait plus de tecktoniks (engloutis dans un tremblement de terre ?) mais Dieu merci il reste quelques « techno-dance » et des poufs. Une pouf par jour pour alimenter en sang chaque fontaine de Paris avant qu’il ne coagule. Les restes seront pour les émos, ils faut bien les nourrir ils n’ont que la peau sur les os (mon âme charitable me perdra) et puis s’ils en décèdent, ils ne vont pas se plaindre, ils voulaient mourir de toute façon. Ils seront les prochains lorsqu’il n’y aura plus de poufs.
Si ça vous choque, c’est que vous n’avez pas compris notre œuvre, c’est juste pour rendre un peu de punch à Paris parce que qu’est-ce qu’on s’y ennuie, nous proposons un programme eugéniste particulièrement étendu visant à limiter la connerie humaine, et vive les épis de blé.
Je pourrais faire de Ronald un symbole, pendu haut et court à la tour Montparnasse, Paris manque de verdure (genre roses noires, orties, mauvaises herbes, pissenlits à consommer par la racine…) et Ronald serait mon jardin. On mésestime toujours les dangers du jardinage, et la main verte de l’ignoble créature que je suis. On sous-estime toujours les nains de jardin, leurs airs vicieux et leurs bonnes joues pleines et rouges d’alcooliques sur le déclin, ils hantent les jardins des braves gens, ils seront mes serviteurs, c’est cro meugnon.
D’ailleurs on ferait bien de s’y mettre. Nous avons du pain sur la planche : du pain béni.