Vendredi 6 août 2010 à 0:06

http://melancholic.cowblog.fr/images/1089805010.jpg


A force de ne voir Andréas nulle part, je me mis à le voir partout.

Ça commençait le matin, lorsque je m’arrachais aux toiles épaisses et poussiéreuses de mes rêves. Je prenais le métro, dévisageant machinalement les passagers, l’œil torve. L’un d’eux levait la tête, nos regards se croisaient, c’était lui. Ses yeux s’éclairaient, il se levait d’un bond et la conversation s’engageait, comme une petite musique.
Mais je descendais toujours seule.

Au magasin, je guettai les entrées, attendant vainement la sienne.
Il entrait brusquement, hagard ou accompagnant un de ses parents avec l’air de s’ennuyer à mourir, il me cherchait des yeux ou détaillait l’environnement autour. Et il me voyait. Je me levais brusquement, lui demandant ce qu’il faisait là. Nous sortions pour avoir un peu d’intimité. Il me faisait alors une déclaration bouleversante, les yeux fous, du genre « j’avais envie de te voir » et je le prenais dans mes bras, comme pour des retrouvailles.
Mais il ne savait pas où je travaillais, pourquoi le saurait-il ?

Sur le chemin du retour, j’espérais le croiser, après tout je lui avais dit une fois ou deux à quelle station j’habitais. Il me voyait arriver, il me reconnaissait, moi je ne fais pas attention aux anonymes autour, il m’interceptait en me retenant par le bras, il bredouillait d’un ton d’excuse « je t’attendais », me serrait contre lui et tout était dit.
Mais il n’était pas du genre à retenir les conversations. Pas avec moi en tous cas. Moi, je me souvenais de tout.

Le soir, je l’attendais encore quand j’y pensais, je l’imaginais tambouriner à ma porte, j’aimais les scénarii romanesques et improbables.
Il ne venait jamais (même s’il avait osé, il n’avait pas mon adresse), je m’étendais sur mon lit, rêvais à la relation que nous n’avions jamais eu.

Je le guettais lorsque je faisais des achats, lorsque je marchais dans la ville, dans les salles d’attentes et dans les cafés, dans les gares et sur l’écran de cinéma, aucune ville, aucune Terre n’est assez grande pour qu’on ne s’y croise jamais.
Le destin nous avait réunit une fois, pourquoi pas une deuxième, comme une renaissance ?

Bien sûr, j’aurai pu lui donner rendez-vous. Mais j’avais un peu peur de sa réponse.

Par Manon (entrelesheures) le Samedi 7 août 2010 à 15:28
article magnifique
tu as le don d'imaginer tous les possibles
c'est beau
 

Envoyer un farfadet à Brocéliandre









Commentaire :








Votre adresse IP sera enregistrée pour des raisons de sécurité.
 

La discussion continue ailleurs...

Pour faire un rétrolien sur cet article :
http://melancholic.cowblog.fr/trackback/3025868

 

<< I'm Darkness | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | I'm Sin >>

Créer un podcast