Vendredi 9 janvier 2009 à 19:12

Je serrais dans mes bras ce pauvre fou, cette vieille épave, comme on cajole un enfant.
Il tremblait dans le berceau, lui que les siècles avaient rongés. Nous n’étions rien que deux solitudes qui se perdent l’une dans l’autre, inlassablement. Nous n’étions rien d’autres que ces deux corps intacts, aux âmes démantelées par le temps, nous n’avions plus d’humain que l’apparence, le sang a dévoré cela en nous.
Nous étions las, tellement las d’avoir été artistes, saltimbanques, conteurs, oiseaux de proie, banquiers, Grands Inquisiteurs, prodiges, anonymes, morts ou vivants…
Nous ne sommes plus rien, nous ne cherchons plus la société des hommes car il n’y a rien à en attendre.
Vous n’êtes que de la viande qui bouge, n’oubliez jamais ça.

Les miens lorsqu’ils croisent votre route, essayent de paraître sous leur meilleur jour, ou vous dévorent. Je suis lasse de cette mascarade.
Vous n’êtes rien pour moi, vous n’êtes rien pour personne.

J’ai aimé, autrefois, je me suis façonnée un compagnon. Mais au fond, qu’on vive un jour ou un siècle, on est si seul. Je n’ai trouvé le repos qu’après avoir aspiré son sang jusqu’à ce qu’il n’en reste plus une goutte. Pas une seule.

Et j’ai ce gamin entre les bras, le monde est trop petit pour nous deux, on se perd, on s’abandonne pendant des siècles et puis on se croise, comme deux fragments d’une même âme se retrouvent… Mais j’ai perdu mon amant, le seul véritable compagnon que m’ait jamais donné l’éternité, le temps et le chant du sang l’a brisé.
Je ne peux me résoudre à le tuer, à capturer son âme en moi, et pourtant c’est sans doute la seule chose à faire.
J’ai l’impression de le trahir, mais quelle alternative me reste-t-il ?
Je n’ai pas besoin de lui demander, je sais exactement ce qu’il lui est arrivé.
On ne survit pas au meurtre de son amour.

Lui et moi sillonnons le monde à la recherche de distractions, parfois nous nous mêlons aux humains, nous nous attachons, nous restons quelques temps avant de nous fondre dans les ombres (ils ne doivent pas savoir, ils ne doivent pas comprendre).
Il s’est juste laissé approché d’un peu trop prêt, il s’est juste laissé submergé par le chant d’un cœur qui bat et un jour, alors même qu’il aimait, il a planté les crocs dans sa gorge, la malheureuse gît au creux d’un fossé.
Au revoir mon bel amour, adieu ma déchirure, celui qui m’a permis d’affronter l’éternité, je vais à présent m’endormir et Dieu sait lorsque je rouvrirai les yeux.
Mais je mens. Jamais je n’aurai été ainsi si je n’avais pas craint de mourir, si je n’avais pas été prête à tout plutôt que la mort.

 
Par Edenchocola le Vendredi 9 janvier 2009 à 19:59
j'aurais tellement de choses à dire sur ton article... mais toutes ces choses se rassemblent en un seul mot : "wah" mais pas un "wah" simple. un "wah" wahesque enfin, je me stoppe là, pour éviter de raconter des bêtises :)
 

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