Vendredi 16 novembre 2007 à 22:49

Dis, Machi

Je suis vraiment laide, hein ?
Je calcule tout. Je ne pense qu'à moi. Ma bouche crache du fiel.

Quelle sale adulte je fais.
La sincérité m'est étrangère, j'aime trop tout compliquer.
Comment les autres peuvent-ils seulement me supporter ?

Du haut de mon trône de plastique, je juge tous ces gens que j'écrase, que je méprise. Les autres aussi –qui suis-je ?-
Je me sens si sale, mon cœur n'est qu'une tache noircie derrière mes côtes.
Je suis en colère, cotre eux, pour tout ce qu'ils ne font pas pour moi –et moi, qu'est-ce que je fais pour eux ?-
Mon regard lui-même est voilé, je filtre la réalité derrière le voile de mon intérêt.

Je suis tellement insignifiante.
Et qu'est-ce que je peux faire, moi, pour les autres ?
Pourquoi je m'obstine à répondre « rien » ?

Je les vois se noyer et j'observe, les pieds de ma chaise fichés dans les marécages, je m'enfonce lentement, mais quelle importance, je vois leur lente agonie, je les regarde, sans doute ce sourire satisfait aux lèvres, celui de celle qui a eu l'intelligence de prendre une bouée percée. Pourquoi ?

Je m'apitoie sur mon sort, sans cesse, et maintenant encore… Serais-je à plaindre ?

 Ne me réponds pas que nous sommes tous pareils.
Il existe des anges, toi même il te pousse des plumes et moi je reste au sol.

À quoi cela peut-il bien servir de vivre si ce n'est pour les autres ?

Je me jetterai bien par-dessus la balustrade, mais ce n'est pas le moment d'attrister davantage ceux qui ont la bonté de tenir à moi malgré tout.

Rassures-toi, Machi. Cette lettre n'est qu'une rêverie solitaire comme il ne s'en produit que lorsque minuit ont sonnées depuis longtemps déjà.
Il faut que je change.
Tellement facile à dire, n'est-ce pas, Machi ?

Merci, Machi. De m'avoir écoutée, lue. Ca va aller mieux, à présent.

Mercredi 7 novembre 2007 à 18:15

Comme détachée de moi.
Tout est calme, tout est bien.
J'évolue dans une paisible irréalité : c'est reposant.
À la fenêtre, un vent frais gifle mon visage : c'est agréable dans la chaleur étouffante de l'appartement.
Dans leur paquet neuf, des cigarettes me narguent : je n'ai pas besoin de ça.

Un couteau fiché entre les côtes. Fée parle de déménagement. Pour qui, pourquoi ?
Jamais je n'aurai cru que…

Bien d'autres balles criblent ma poitrine, mais je n'ai pas envie de penser à ça pour le moment.
De toute façon, rien ne sert de fuir, nos ennuis futiles nous rattrapent toujours, vous ne croyez pas ?

Comme une bourrasque qui m'emporte au loin. Elle porte un nom : Battle Royale.
Magnifique ?
Seriez-vous prêt à tuer votre meilleur ami si votre survie en dépendait ?
Non, sans hésitation. Pourquoi survivre ?
Une autre fois, peut-être ?...

Vendredi 19 octobre 2007 à 23:43

Je tourne et tourne et tourne dans cet appartement  vide, même Petit Prince ne m'y tient plus compagnie.
Un seul être vous manque et tout est dépeuplé.

Sans Fée, l'atmosphère est si lourde, j'étouffe même les fenêtres grandes ouvertes sur la pollution du dehors.
Je vais bien. En tous cas j'essaye. Comme quoi tout arrive.
Pas de nouvelle de la fille du banc. C'est triste, c'est sûr.
Les rares visiteurs de ma tour d'ivoire me trouvent le teint pâle. Je ne sais même pas pourquoi je vous raconte ça.

N'en pouvant plus de cette cage qui crie l'absence, j'ai pris mon manteau, je suis sortie faire quelques pas.
Trottoir, vent, morsure du froid.
Je me bats pour allumer une cigarette, sous un porche.
C'est mal, je sais. Vous croyez vraiment devoir me le rappeler ?
J'essaye de me limiter, vous savez. Mais là, j'ai trop besoin de penser.

Les rues décevantes. Je songe à Petit Prince, de toute façon il n'a plus le temps, plus le temps de rien, plus le temps de moi, et… Tornade sub-thoracique.
J'aimerai vous en dire plus mais je refuse de figer ce tourbillon anarchique dans une réalité. C'est d'un trop mauvais goût et tellement indécent…

Je pousse une porte, c'est un marchand de livres, étalages froids, impersonnels, normalisés.
On se contente de ce qu'on a.
Je me promène entre les rayons, me gave de cette odeur de livres neufs, je feuillette un ouvrage, le repose, je savoure ce rare privilège.
Je n'ai plus le temps, plus l'argent d'alimenter ma boulimie de phrases. C'est dommage, c'est sûr.
Je tente de retenir quelques titres, quelques noms, quelques lettres, que j'oublierai à coup sûr en franchissant le seuil de l'échoppe. Je reviendrai.

Je passe devant des terrasses, des cafés. Je voudrais entrer mais mon porte-monnaie crie famine.

Mes pas rythment mes rêveries, et Dieu sait que tout cela est sale et laid et vain et triste.
Tellement plus sale de nier.

Et puis cet imbécile, il ment comme il respire. Mais qu'est-ce qu'il cherche, dites-moi ?
Cela me rendrait sans doute triste s'il ne m'était à ce point indifférent, à présent.

Le royaume du roi des sylphes surgit.
Il portera peut-être ses lunettes, il pourra peut-être m'ouvrir sa porte, nous pourrons peut-être nous affaler sur quelque sofa et ne pas parler, fixant l'écran d'un œil torve, cigarette sur cigarette et… Ce sera peut-être bien.

Samedi 15 septembre 2007 à 9:05

Fée

 

Je t'écris de ma geôle glaciale. Mais qu'est ce qui m'a pris de venir ici. Dis-le moi.
Je ne suis pas certaine de pouvoir tenir une minute de plus. Alors une année…

Mais comment vas-tu, toi ?
J'ai appris que ta nouvelle année a mieux débutée que la mienne. Tant mieux. Tant mieux.
Pourvu que ça dure.

Ici, ça ne s'améliore pas.
Un an seulement et cela semble si loin.
J'aimerai tant prendre la clef des champs et le lendemain non. Je ne sais plus très bien ce que je veux moi-même.
Les règles sont plus dures que jamais, je suis loin de ma confidente et puis…
Je ne sais pas. Mon coeur est saturé d'un mauvais pressentiment.

Je veux rentrer à la maison.

Je voudrai être libre d'être seule. Libre d'être moi.

Attendre, c'est encore la meilleure chose à faire.
Fuir. Viens m'envoler.

Vendredi 24 août 2007 à 21:06

Enfin dans l'appart' avec Fée. Tout est bien.
Elle est magnifique, le bonheur lui va bien au teint.
Parfois, je suspends mon geste et je lui dis « Fée, je suis heureuse » et elle sourit sans rien dire.
Je suis heureuse bien vite, n'est-ce pas ?
Et puis après ?

Les nuits ont le goût de l'aventure, de la folie, et de l'urgence.
Les jours sans soleil s'évaporent.

Bientôt un retour à la vie normale…
Je me dois de noircir les pages, je les ai trop négligé, comme me le rappelle sans cesse mon éditeur.

J'allume une cigarette et Fée me jette un regard lassé.
Je fume à en avoir la nausée, car la nausée est le privilège du fumeur.
Les yeux vitreux, je songe à mon Prince et renverse un verre de lait fraise.
Fée accourt avec une éponge. Elle a l'habitude.
C'est gaffe sur gaffe en ce moment, heureusement les autres ne m'en tiennent pas rigueur, ils ont tort : peut-être qu'alors je cesserai de me haïr, mon corps est l'ennemi. Je le traîne comme un boulet.

L'incident est clos, Fée jette un regard amusé, cette histoire aura fait le tour de notre cercle d'ici deux jours, dernière d'une longue série et peut-être en effet que ce n'est pas si grave.
Alors je me blottis dans les vêtements trop larges du Prince, il est un peu magique.

J'aimerai en parler encore mais je ne voudrai pas vous indisposer.

Fée est joyeuse, elle attend le roi des sylphes, elle volette de-ci delà. Je crois qu'elle s'inquiète pour l'avenir, pour leur avenir, et tout ce que je peux lui dire c'est que je suis sûre que tout ira bien, que je l'aime.
Les mots ne me suffisent plus, les étreintes ne me suffisent plus, même le langage de la peau a perdu son sens, je suis un peu nostalgique car tout est plus beau dans nos souvenirs.
Tout a basculé.

Mais j'ai encore Fée, du temps et une cigarette, tout est bien.

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