Mardi 14 juillet 2009 à 11:08

Elle tirait les cartes au bord d’un feu de bois et de quiétude. La pièce était jonchée de babioles pittoresques et hétéroclites, comme les trophées extirpés de mille voyages, comme le signe d’une vie spirituelle bouillonnante. La propriétaire de cette ruine bancale ne pouvait être qu’exceptionnelle ; de ces êtres à part, intensément humains, qu’on brûle de rencontrer dans l’espoir d’être touchés par leur grâce incandescente ; sans jamais songer à ce qu’on pourrait leur apporter en retour. Comme si leur bonté, leur amour palpable et leur sagesse les arrachaient à ces calculs tellement humains, faits de désirs, d’attentes, de passions.
Les pièces de sa maison étaient peuplés d’objets inutiles et chargé d’une âme, arrangées façon baroque et gitane, comme saturées au hasard et pourtant cette bicoque à la façade salamandrée respirait d’énergie.
Elle tirait les cartes, éclairée à la lueur seule du feu et d’une lampe à l’ancienne, il faisait nuit depuis si longtemps que j’avais perdu le compte des heures. Elle répugnait à se servir de l’électricité, lui préférant la chaleur sensuelle de la flamme.
Elle tirait les cartes et tout était si calme, une harmonie de cristal résonnait dans les pièces silencieuses et pourtant il était temps de partir, son corps vibrait d’une injonction silencieuse et pourtant je ne pouvais m‘arracher à ce fauteuil élimé et douillet, à la moiteur de l’atmosphère qui régnait dans cette demeure, elle en était la reine de Sabbat.
La porte s’ouvrit comme une invitation et je pris congé, happé par les nimbes ténébreuses du corridor.

Lundi 13 juillet 2009 à 19:20

http://lililuna.l.i.pic.centerblog.net/ciop0pmd.jpg

Je me demande d’où provient cette étrange manie de s’exprimer à travers ses vêtements. Si l’habit ne fait pas le moine, alors qu’est-ce qui fait le moine ? J’aime projeter ce que je suis sur mon enveloppe physique, les autres changent de direction lorsqu’ils croisent mon chemin. Je suis celle qui égare les voyageurs, celle qui bouleverse les consciences au point qu’elles croient sur le point de se déchirer. Je ne vous conterai pas une rencontre car je suis un félin solitaire. J’aime affronter seule l’œil aveugle du cyclone. J’i parfois le sentiment de disperser en volutes ceux qui m’approchent, comme une bourrasque sacrée chargée de mille aiguilles. Je suis le vampire de midi, je voulais juste revoir le soleil une dernière fois. Connaissez-vous la détresse des démons nocturnes, savez-vous la douleur sourde qui bat dans leurs tempes ? C’est un mal plus vieux que le monde, tellement plus ardent que la brûlure d’une étoile. J’avais rêvé de vivre toujours et je me consumais de voir le soleil encore une fois. Mon visage ‘est plus qu’un masque de cendres, figé à jamais par le cri muet de la morsure des flammes. Et je me suis soudain demandée si je pourrais aimer à nouveau. Les siècles ont donné à mes cheveux, mes pupilles et jusqu’à mes ongles le grenat du sang qui m’abreuve. Je suis une chimère et pourtant j’ai aimé à la passion. Pouvez-vous ressenti la morsure glacée d’un dernier coucher de soleil, d’un cœur qui se consume ? Je sais à présent que jamais je ne cesserai de hanter les chemins, des cendres dispersées par le vent.

Samedi 11 juillet 2009 à 18:45

http://melancholic.cowblog.fr/images/731340034.jpg

Je pensais que je saurais quoi te dire en pareilles circonstances, mais on ne sait jamais vraiment quoi dire. J’aimerai que tu voies par mes yeux les galets inconfortables, les reflux qui soupirent et le ciel cendré. Mais toi et moi ne feront jamais un. Rejoins-moi. C’est amusant, il n’y a personne ici. Je vais au café, je me prépare moi-même un expresso trop serré et je laisse quelques pièces sur le zinc, je sais que quelqu’un s’en empare. C’est comme si l’Humanité s’était retiré d’ici. Je t’envoie le goût des embruns sur mes lèvres, mon amour.

Samedi 11 juillet 2009 à 18:19

http://melancholic.cowblog.fr/images/5SC5CAT2N8KCCAIYBA9KCARZOTVQCA101MH7CAJSPJNOCA2TY79ACA39P5S7CARGWVVGCA9111TQCAWS0BYSCAHV3RPXCAWPS2GUCAFPG4F2CAODVN06CA3XY355CA4YTQ1BCAF5Q5KSCAIHPTVLCAQH4E4GCA95RON2CADGVPGBCAODBMOECAF00ECNCA9JWDV9.jpg

Cette incroyable expérience du monde. Toute l’existence est là, palpitante, comme un cœur prêt à se rompre. Qu’est-ce qui importe encore ? Dehors, le typhon. Rien que les bourrasques et la fureur de l’ondée. Les fantômes, ils tapissent le décor. Un incendie emporte tout ce qu’il reste de cher. Ces étincelles mordorées qui dévorent orgueilleusement le ciel. J’aimerai les oublier, elles me rappellent que quelqu’un m’attend. Au bord du monde, je suis heureuse.

Lundi 29 juin 2009 à 22:27

http://melancholic.cowblog.fr/images/L.gif
Qu’est-ce que tu voulais que je te dise ? Tu n’es qu’une poupée sans fil. Déchéance et déformation. Tu vois, je voulais te dire quelque chose de gentil, de moelleux et de tiède, mais encore une fois tu gâches tout.
Charlotte était une femme surprenante, au premier rendez-vous elle m’a fascinée, le deuxième elle m’assommait. C’est injuste.
Nous nous sommes mariés, par lassitude. Charlotte est délicieuse, elle m’écœure. Chérie, et si je t’installais sur l’étagère, près des plats de porcelaine que tu aimes tant, tu seras si bien.
Charlotte ne pouvait se passer de « son crâne », une espace d’horreur en calcium d’origine probablement macaque. Au début, c’était un simple élément de décoration d’un goût douteux, il prenait la poussière sur les tables basses ou les coins d’étagères, je prenais soin à le mettre à l’abri des regards. Mais Charlotte est une femme « profonde », Charlotte a besoin de réfléchir à la mort, alors Nestor est devenu le meilleur ami de Charlotte. Il a commencé à se faire plus présent, plus pressant, à déjeuner à notre table et regarder des racines et des ailes avec Charlotte. Il a fini par la suivre partout, lorsqu’elle fait ses ablutions et dans la chambre conjugale. J’en ai assez de m’ébattre devant un squelette. Et avec un squelette. Car ce brave Nestor a fini par prendre part. J’ai encore les marques de dents.
Alors mon clafouti, puisque tu penses tellement à la mort, pourquoi attendre un instant de plus ? Je vais chercher la pelle.

<< I'm Darkness | 24 | 25 | 26 | 27 | 28 | 29 | 30 | 31 | 32 | 33 | I'm Sin >>

Créer un podcast