Mercredi 6 octobre 2010 à 17:44

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Andréas. Je crois que ce sera ma dernière lettre. Parce que tout passe, même le grand amour. Quelque chose est mort en moi, une obsession chasse l’autre. Au fond tu n’étais qu’un prétexte. Et ça me rend tellement triste, de me dire que tout ça au fond ça ne comptait pas, ce n’était qu’une passade qui prenait juste un dernier verre. C’est ma dernière lettre car m’accrocher à toi serait passéiste et néfaste. Alors je reviens à la vie d’avant de te connaitre, la vie que j’ai toujours eu. Ton prénom me fera toujours sursauter, ton sourire chavirer, c’est une vieille habitude. Mais je ne crois plus que tu pourras m’emporter au loin (pourquoi faire ?). J’avais tellement de choses à te dire, mais au fond ce n’est rien, c’est une lettre de rupture pour une relation qui n’a pas commencée. De toute façon on en est toujours déçu par ces histoires. Ça me rend tellement triste, tu as occupé tellement de place que sentir que je te laisse enfin partir… je vais me remplir de passades, de coups de cœurs et de tocades, de plus en plus vite, pour oublier que tu ne comptais pas, que tu étais comme les autres. C’est une boite que je vais refermer, pleine de poussière et de mystères, déjà je sens en tomber le couvercle, lorsque je tente de l’entrouvrir les épines écorchent mes doigts. Avec cette lettre, qui rejoindra les autres. Maiq il suffira d'un geste de ta part...

Mercredi 6 octobre 2010 à 14:02

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Je fais le pari qu’il m’aime encore. J’en fais le pari car c’est plus simple comme ça et puis c’est moins triste. Ne pas se laisser affecter par les froides évidences, toujours lui trouver des excuses – je ne peux pas abandonner. Dans l’attente de jours meilleurs.

Je lui donne rendez-vous parce qu’il faut bien qu’il y ait un moment de révélation. C’est toujours facile de parler avec lui – j’ai toujours peur de ces rendez-vous perdus, où on ne sait pas trop quoi se dire. J’aurai juste aimé que cela vienne de lui. On parle de nos cours, de nos occupations – on pourrait croire qu’on se connait bien. Mais je n’ose pas aborder le seul sujet qui omtpe. Trop bizarre. Je fais le pari qu’il m’aime encore. Enfin aimer c’est un bien grand mot. J’espère même qu’il ne m’aime pas, qu’il ne m’a jamais aimé, parce que l’amour ça passe. Je préfère croire que je lui plais, c’est une alchimie qui prend moins l’eau. Mon visage est resté le même, je suis restée la même. Alors je fais le pari que je lui plais encore.
J’avais tout prévu. Il aurait suffit qu’il me demande des nouvelles de mon petit ami. J’aurai soupiré, j’aurai secoué la tête, je lui aurai dit qu’il y a peut-être quelqu’un d’autre. Il m’en aurait touché un mot, au moins par politesse. Il m’aurait demandé « et lui ? » et j’aurai pu lui répondre « à toi de ma le dire », droit dans les yeux. Et serait venu la révélation. J’aurai cessé de parler seule, de m’exposer en van, nos sentiments respectifs (quels qu’ils soient) seraient tombés dans le domaine public. Au moins, on aurait pu en parler. Dans l’attente de jours meilleurs.
L’instant n’est pas venu, je n’ai jamais su les saisir. Ou alors je me suis dégonflée, j’ai juste dit « ça va… » avec un pauvre sourire qu’il n’a pas décrypté ou un « je ne sais plus trop où j’en suis », femme cruelle toujours changeante, dévorant encore le cœur d’un homme dont elle s’est lassée. Je me retire avant de créer le déclic. Dans l’attente de jours meilleurs.
Nos rares rencontres, c’est comme la reprise d’une longue conversation inachevée, épisodique. Peut-être mettrons-nous à jour les connaissances de nos existences respectives, peut-être plus tard, si je lui propose. Il faut dire que je suis sortie de sa vie. Il faut dire qu’il ne m’y a jamais fait entrer. Il faut dire qu’il y a quelqu’un, qu’il y a toujours quelqu’un. Il faut dire qu’on trouve toujours des excuses.  Dans l’attente de jours meilleurs.

Samedi 2 octobre 2010 à 23:14

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Avant que la porte ne daigne s’ouvrir, Alice était devenue experte dans le tombé des draperies qui encadraient les lucarnes. La femme aux chignons consultait régulièrement sa montre en soupirant, mais ne se fendait d’aucun commentaire, ce qui agaçait Alice qui ne savait pas comment engager la conversation pour passer le temps.
Le serviteur, mu d’une impulsion soudaine, tira la poignée sur un rire léger, enfantin. La femme aux chignons bondit sur ses pieds et se présenta à l’embrasure de la porte. Alice, faute de mieux, la suivit.
Un laquais invisible annonça « le lapin blanc et Alice demandent à voir la Reine ». Une voix cristalline répondit d’un ton las « et bien qu’elles entrent ».
Dans la pièce, qui donnait sur les jardins (des roses rouges embrassaient la balustrade, courbées comme si elles étaient sur le point de s’assoupir), un homme âgé, l’air préoccupé, regardait le paysage comme s’il rêvait de s’échapper. Il était assis derrière un bureau croulant sous des piles de papiers jaunis. Deux larbins, harengs de leur état, encadraient la porte, les yeux rivés sur une femme assise sur une pile de coussins pourpres, à même le sol, elle jouait avec une peluche.
Alice supposa que ce devait être la Reine, puisque c’était la seule femme, elle fut cependant surprise de la jeunesse des traits de la femme lorsqu’elle se tourna vers Alice. Elle ne paraissait pas avoir plus de vingt ans, et les moues qu’elle prenait en inspectant Alice du regard la rajeunissaient encore. Drôlement jeune pour une directrice, se dit Alice. Pas étonnant qu’elle prenne un titre prétentieux comme « Reine ».
Alice décida de scruter la Reine en retour : deux mèches cerise encadraient son visage, mais le reste de sa chevelure était noir ténèbres, massée en chignon sur la nuque. Ses yeux noirs avaient pris un éclat dur alors qu’elle détaillait Alice. Elle était cependant très belle, avec son teint d’albâtre et la robe groseille, décolletée et très ajustée à la taille, qui moulait ses formes.
La Reine soupira finalement et lâcha d’un ton indifférent « c’est donc toi Alice qui a décimé tant de mes hommes. Tu veux jouer avec moi ? ». Alice, un peu désarçonnée, regarda autour d’elle afin de s’assurer que l’invitation lui était destinée. La Reine répéta avec un sourire léger « viens jouer avec moi. » et elle se consacra à nouveau à sa peluche. Les domestiques avaient fait un pas en avant, comme pour couper toute retraite à la jeune femme. Elle s’assit donc sur les coussins, un peu anxieuse : elle ne comprenait pas ce qu’on attendait d’elle. La Reine dégagea une brosse à cheveux d’entre les polochons et commença à coiffer Alice, tirant sans délicatesse sur les boucles de la jeune femme. Alice voulait protester mais chaque fois qu’elle ouvrait la bouche, le Lapin Blanc, le vieil homme ou les serviteurs la regardaient d’un air si sévère qu’elle renonçait et refermait la bouche, comme un poisson.
« Qu’on lui coupe la tête. » annonça brusquement la Reine, en laissant la brosse plantée dans les cheveux d’Alice., se consacrant à nouveau à son chaton en peluche.
« -Ma Reine, glissa le vieil homme, ce n’est pas la bonne Alice. Celle à laquelle vous pensez est brune.
- Et alos ? Je la déclare coupable du crime de s’appeler Alice Elle mérite de mourir.
- Majesté, si elle est bien ce que je pense, c’est une étrangère, et nous n’en avons pas vu depuis… Il faudra demander à la maison du Trèfle. Quoi qu’il en soit, nous devrions probablement l’interroger avant de la remettre entre les mains de la justice, si je puis me permettre.
- Trop tard, je n’ai plus envie. Je n’ai jamais eu d’étranger de compagnie. Qu’elle reste. »
Soudain, Alice fronça le nez. Une odeur infecte saturait l’atmosphère, elle se demandait comment elle avait pu ne pas la sentir plus tôt. La Reine n’en semblait pas incommodée le moins du monde.
« -En parlant d’animal de compagnie, ma Reine, je crois qu’il serait temps d’adopter un nouveau chat, je crois que l’odeur qui émane de votre dernier favori semble indisposer Alice. »
Alice comprit alors avec un haut-le-cœur que ce qu’elle avait pris pour une peluche était en fait un animal (mort). La Reine jouait depuis dix minutes avec un cadavre.
« Dommage. Il était joli. » soupira la Reine en jetant la dépouille par-dessus son épaule, elle heurta le mur avec un bruit sourd.
«- Papa, il faut que tu me trouves un chaton qui m’obéit, comme ça ils dureront plus longtemps.
- Ma Reine, répondit le vieil homme (le Roi ? Mais pourquoi était-elle reine alors que son père était toujours en vie ?), vous ordonnez à vos chatons de ne pas grandir, c’est impossible.
- Je ne grandis pas, moi. » Elle se tourna vers Alice. « Tu n’es pas très distrayante, Alice l’étrangère. Sais-tu jouer au criquet ?
- non, personne n’y joue plus là d’où je viens.
- Tu es donc coupable d’incapacité notoire. Dommage qu’on ne puisse pas te couper la tête pour l’instant. Qu’on l’emmène chez les Trèfles, ils sauront peut-être quoi faire d’une handicapée. »
Alice la blonde sentit qu’on lui empoignait fermement les bras avant qu’on ne la traine hors du Cabinet du trône, à l’envers. Elle vit l’antichambre, puis les couloirs, puis l’entrée du lycée, puis le lycée et ses jardins s’éloigner, tandis qu’on la tirait vers les Trèfles, quoi que cela puisse signifier. « Quel drôle de monde, je vais être examinée par des plantes. » songea Alice en imaginant un trèfle à trois feuilles géant penché au-dessus d’elle, la feuille du centre ornée de deux yeux et d’une bouche, les feuilles latérales jointes pour tenir une loupe.

Mardi 21 septembre 2010 à 17:32

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Je fais des rêves et ces rêves me construisent. Peu à peu les images aléatoires et surannées, fragiles comme des toiles d’araignée que le réveil déchire, s’impriment en moi et me transforment.
À chaque fois que je la regarde, je pense au rêve et l’atmosphère devient plus moite, plus confinée. Je repense au rêve et à la fraicheur des draps sur lesquels nous étions étendues côte à côte, à son sourire un peu gêné (elle me tenait la main devant ses amies), à sa jupe un peu froissée (le rêve était une fête, le rêve était une fièvre). Le rêve efface l’instant et je la désire à nouveau, moi qui n’avais jamais désiré une femme.
Je n’ose pas lui en parler, ça lui ferait peur. De toute façon, ce rêve m’appartient, il est gravé dans ma chair. Je la regarde et je savoure d’un œil neuf sa grâce discrète, son charme retenu. Qui parle, le rêve ou moi ? Dans les rêves, tout est tellement plus intense, débarrassé de pensées intermittentes. Le rêve parasite mes réflexions et mes goûts, il fait de moi une créature chimérique, je ne sais plus si ces images sont des souvenirs ou des mensonges. Les rêves font tellement plus vrais.
Ce soir, je rêverai de quelqu’un d’autre.

Vendredi 10 septembre 2010 à 21:07

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Assis l’un à côté de l’autre, le silence oscille, hésitant ; nous partageons une cigarette, un instant de répit. Il ne me regarde pas, je ne suis qu’un masque anonyme, posé là par hasard, je sais qu’il m’identifie plus qu’il ne me reconnait.
J’aimerai me déverser en lui, lui graver toutes mes pensées, tous mes soupirs sur la peau pour qu’enfin il m’offre un sourire. Je l’empoignerai, lui ferai face et il ne pourra faire autrement que de me regarder. Sans regard, le masque n’existe pas.
On prendrait un train pour aller nulle part, on deviendrait intimes, complémentaires. Il y aurait une étincelle et je ne serai plus obligée de dire des insanités pour peupler le silence, c’est le rôle qu’on m’a attribué. Il devrait m’embrasser, comme une évidence. Il devrait en être ainsi car le masque n’existe que dans l’amour des autres.
Je déteste lorsqu’il me rejoint dehors, l’air un peu las, comme si je ne comptais pas. Je déteste lorsqu’il me dit au revoir de loin, pressé de fuir, comme pour éviter de me toucher. Je déteste lorsque mon regard se perd vers lui et qu’il ne croise jamais le sien, il regarde toujours ailleurs. Je voudrais lui dire « et pourtant cette aparté entre nous, cette discussion qui refusait de finir, ça veut bien dire que ça compte, n’est-ce pas ? Ça veut bien dire que je suis digne d’exister ? ». Mais les masques ne disent pas des choses pareilles.
Il faut peut-être attendre encore un peu.

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