Samedi 3 octobre 2009 à 13:57

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C’est ainsi que je suis devenue exactement la mère que je ne voulais pas être, que je craignais d’être. Je leur avais dit, aux médecins. Que je n’étais pas née pour être mère.
Ce gosse, je l’ai détesté, pendant 7 mois, le temps que j’entende parler de lui. Je l’ai détesté de me déchirer le ventre, de me rendre laide et impotente, de me rendre malade, malade.
Après, il est sorti de moi, mes muscles hurlant de douleur et de soulagement. Mais finalement, ça ne faisait que commencer.
Les premiers mois ont été les pires. Parce que je m’attendais à une révélation en prenant le tas de chairs dans mes bras. Et parce qu’il m’empêchait de dormir. Cette histoire d’instinct maternel. Juste un mensonge pour donner envie aux femmes de reproduire la catastrophe de la vie. Révolution des mœurs, mai 68. Au fond, une femme stérile a raté sa vie. La femme ne peut se réaliser que dans la maternité. Personne n’a envie d’admettre que les parents peuvent ne pas aimer leurs enfants. Les hommes, passe encore, ils n’ont qu’un rôle assez ponctuel dans la conception. Mais une mère…
Je me suis sentie flouée, tandis que je lui préparais des biberons à 3 heures du matin. Et je me sentais vaguement coupable, aussi. De ne pas y prendre plus de plaisir. Et je me suis rappelée que je n’avais pas demandé à être enceinte. Je me suis rappelée qu’on m’avait refusé l’ablation des ovaires, on avait voulu faire de moi une mère, à tous prix, bonne ou mauvaise, soi-disant pour ma propre réalisation, mon propre bonheur. Dites plutôt que dans vos tripes il y a cette vieille volonté fordiste de croissance démographique pour gagner la bataille (laquelle ?). Dites plutôt que vous êtes choqués par cette opiniâtreté à aller à l’encontre des instincts, de la perpétuation de l’espèce.
Et j’ai regrette tellement de saper ce gosse, inexorablement, d’investir pour qu’il hante les cabinets de psy plus tard. J’essaie de décharger autant que je peux le poids de mon indifférence sur le père, il est tellement patient, tellement aimant, moi je n’ai pas la place, je n’ai pas de place pour cet enfant, même mon corps en est sorti déformé, tordu.
Je suis le genre de mères qui doit définir un rappel sur son téléphone pour penser à aller chercher son fils à l’école. Je suis le genre de mères qui ne regarde même pas le bulletin de notes. Je lis parfois des histoires à mon rejeton, mal, pour qu’il demande à son père. Je suis le genre de mère qui lance son assiette à son gamin sans le regarder. Lorsqu’il faut l’emmener au zoo ou au cinéma, je me défile au bout de dix minutes, la cigarette aux lèvres. Je ne rêve que de fuite.

Vendredi 2 octobre 2009 à 19:29

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A toi. Beau, lointain, filigrane. Berger, beau parleur, voleur de reflets. Notre image papillonne, tu la captures.
Prêtre de cet antique écho, de cette angoisse sans fin, un puis (je me cogne aux parois). Tache de fixer la seconde volatile sur ta pellicule, saisir l’instant. Je veux remonter le temps.
À toi. Entre nous une mécanique, je resterai pour toi une image papier glacé, tu resteras le regard qui enflamme.
Tu m’as saisie, mon visage et mon âme. C’est ainsi que tu fais : tu t’insinues dans les chairs, dans les cœurs, tu les prends à pleines mains, tu les regardes palpiter. Tu les envoies, tu les lances (ne dit-on pas que le cœur à des ailes ?). Tes modèles sentent le vent sur leur visage, pleines de toi. Jamais, jamais elles ne se sentiront libres à nouveau. Et tu les lâches et le cœur s’éteint. Une nouvelle rencontre. Pour nous, il ne restera que toi.

Vendredi 2 octobre 2009 à 19:17

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A tous mes amours passés. A tous ces hommes vite apprivoisés, vite oubliés, ombres de ma mémoire, mon tendre souvenir à ce panthéon anonyme, tous ceux qui ont eu la grâce de me sauver et tout passe. À tous les inaccessibles, ces hommes que j’ai aimé au fer rouge gravés dans ma chair, ceux que je n’oublierai pas, ces hommes vers qui j’ai tendu les mains mais je n’ai rencontré que de la fumée. À celui qui me brûle encore, qui me brûlera toujours. À ceux dont mon image est gravée dans la rétine, je regrette. À mes sauveurs.

Jeudi 1er octobre 2009 à 21:51

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Auprès d’elle, entre le flacon de somnifères et l’oreiller, il y avait un mot, le testament que les morts laissent toujours, comme si ça intéressait encore quelqu’un. Y étaient tracés en belles lettres déliées « dites à Andréas que je l’aimais ». de la charogne pour les harpies. Il n’y a pas d’Andréas à son chevet, il n’y en a jamais eu. Arthur, le petit ami en date, met le prénom suspect sur le compte de l’égarement, il restera un peu vexé mais il est trop sonné de douleur pour penser à ce genre de détails.
Les amis s’interrogent à mi-voix, on s’occupe comme on peut lorsque le cadavre encombrant prend toute la place. Quelques malins évoquent les écrits de la morte, les somnifères lui auraient fait confondre roman et réalité, elle en oubliait qu’Andréas n’était qu’un personnage de papier. Les romantiques tablent sur une liaison cachée, un amant (une amante ?) dans le placard. Certains croient deviner, certains s’inquiètent, tous s’interrogent sur le mystère embarrassant du cadavre.
Mais comme tous les secrets, il faut bien que quelqu’un sache la vérité, sinon il n’y aurait pas d’histoire. Andréas, un nom pour un autre, une passion pour une autre, personne ne devait savoir.
Ce message est une mission, et cette personne le sait bien. Elle porte cette confession en bandoulière, elle aimerait garder les mémoires bien propres bien nettes et sans doute elle le fera. Un secret que seule la mort pouvait concilier avec la réalité. Ce rituel antique du seppuku, il n’y avait rien d’autre à faire. Elle le dira à Andréas, il a le droit de savoir. Mais la partie est finie, échec et mat. Qu’est-ce que ça change.  Il n’y a plus rien à ajouter. Et la poussière pourra s’installer sur les émois sans importance d’un macchabé parmi d’autres et les vivants pourront se lover dans leurs tendres illusions, inconscients de la déchirure béante, cette oppressante fragmentation que la charogne cultivait en son sein. La vie est faite pour les vivants.

Jeudi 1er octobre 2009 à 21:10

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Rien que la peine. Un secret qui souffre de ne pouvoir être dévoilé. Souffrir de ne pas savoir, de ces flèches tirées pour mieux fendre une cible toujours floue, toujours absente.
Une situation grippée, le dénouement ne pourrait être pire que le mal.
Un grand amour comme on en fait plus, un coup de foudre à l’ancienne, avec miettes de chocolat et chantilly, bon appétit mademoiselle.
De l’amour à en avoir la nausée, dont on se repait en cachette dans le secret de l’alcôve.
Tout ce sucre qui pétille sur la langue, la cuillère qui tranche et met les chairs à nu. Tout ce parfum d’amande amère sous la crème pâtissière et les saveurs sortie d’usine, le règne des esters. Saupoudrer les choux de sucre ou d’arsenic, indifféremment.

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